Si Sasha courrait dans le hall d'entrée de l'université Stanford en se lançant à lui-même des injures, ce n'est pas qu'il ait complétement perdu la tête mais bien qu'une fois encore, il sortait en retard du cours de littérature. Le cours de littérature ? Pour un étudiant en Antropologie ? Bah oui, pas commun n'est-ce pas ? Pourtant, Sasha ne s'était pas trompé de cours, au contraire, lorsqu'il se mettait en tête de suivre le cours de littérature pour lequel il n'est même pas inscrit, c'est qu'il savait exactement ce qu'il faisait. La raison ? elle est bien superficielle. Ne prenez surtout pas Sasha pour un étudiant modèle qui suit des cours en extra juste pour élargir sa culture générale, non loin de là. Sasha avait déjà bien assez avec tout les cours de son option pour s'en ajouter d'autre. Pourtant, il n'était pas rare de voir, comme aujourd'hui, Sasha sortir du cours de littérature en quatrième vitesse pour atteindre son cours suivant: EPO ->l'étude des peuples occidentaux. A chaque fois donc que Sasha Lloyd Kingston se faisait le plaisir de suivre le cours de littérature, il arrivait en retard à son cours d'EPO. Et aujourd'hui encore, le jeune antropologue courait dans les couloirs pour rattraper son retard. Et cette fois-ci, il n'échapperait sans doute pas à la retenue.

Mais pourquoi donc Sasha s'entêtait-il à suivre un cours hors de son programme et prenait-il le risque de se faire renvoyer d'un cours nécessaire au cursus de son option ? La raison se nommait tout simplement Dexter B. Lawrence. Le jeune étudiant avait littéralement craqué pour le professeur de littérature et Monsieur Lawrence avait ce charisme dingue, une prestance incroyable bref la classe britannique contre laquelle Sasha ne pouvait que fondre. Et c'était rien que pour admirer le bel homme parler pendant des heures que Sasha assistait à ses cours. L'homme de lettres charmait pas mal d'étudiantes à l'université et beaucoup d'entres-elles rêvassaient posait leur tête leur poings dans les auditoires au cours de littérature, mais le professeur Lawrence n'avait que Sasha comme unique admirateur actif. Actif ? Bien sûr, l'étudiant n'avait pas honte d'afficher clairement son attirance pour le mentor de récits. Regards profonds, petites attentions et parfois même quelques discutions en dehors des cours, Sasha tentait tout envers le professeur. Mais aussi en tant qu'étudiant, il participait activement aux cours de Lawrence où il posait le plus souvent des questions pas toujours intéressantes mais souvent censées.

Sasha arrivait à la fin de sa cours devant les valves du hall de l'université où s'étalait tout les horaires et le jeune homme ouvrit des yeux tout ronds lorsqu'il vit la prochaine case de cours rayées de rouge avec la mention cours suspendu. C'était bien sa veine ça, il s'était dépêché pour rien...au moins cette fois-ci, il ne serait pas en retard.
En se retournant dans le couloir, le jeune homme cherchait de quoi s'occuper donc pendant l'heure suivante. Et paf ! On dirait bien que la chance tournait en sa faveur puisqu'au bout du couloir le professeur Lawrence, le sublime britannique qui faisait fondre le cours de Sasha s'avançait vers lui alors qu'il venait à peine de sortir de con cours. L'étudiant affichait alors son sourire le plus craquant et se passait discretement la main dans ses cheveux puis vint à la rencontre du professeur.

- Merci pour ce cours, professeur c'était vraiment intéressant cette comparaison de la vie de Charles Dickens et de ses romans. J'ai adoré les points communs notamment pour la partie traitant de sa mort.

Sasha s'était tellement rapproché qu'il hésitait quelques secondes avant d'oser même un contact avec Dexter. Puis, en rougissant légèrement, Sasha osa une main sur l'avant-bras du professeur et en inclinant la tête avec sa mine la plus chou, il ajouta:

- C'est vraiment un plaisir d'assister à vos cours, professeur. Ca vous dirait d'aller à la cafétaria pour parler littérature ? J'ai tellement de questions à vous poser ...enfin, si ça ne vous dérange pas bien sûr.

Dexter appréciait de pouvoir donner des cours, et peut être, avec un peu de chance, inculquer une valeur ou deux à ses jeunes étudiants. Ceux qui se laissait impressionner par les listes de bests sellers plutôt que par l'essence même du bouquin. Certaines questions était si prosaïques que cela le décourageait un peu mais il ne devait pas laisser ces étudiants de premières années, le décourageait. Il préférait nettement les étudiants des années supérieurs qui accordait un peu plus de crédibilité à ses dires. Dex aimait enseignait, même si ce n'était pas autant qu'écrire, au moins, il pouvait faire en sorte de transmettre sa passion. Et qui sait peut être trouver un étudiant ou deux se révélant prometteur. Et pourtant tout autant que Dex aimait enseigné, il avait horreur de cela. La raison, ses jeunes femmes aux décolletés vertigineux qui se faisait un plaisir de croire qu'il venait dans un amphithéâtre pour autre chose que donner ses cours. Il avait horreur de cela, parce que d'une part ses attentions le mettait mal à l'aise, il était beaucoup plus renfermé que ses américains, et il n'avait jamais eu exactement le même problème en Angleterre, et d'autres part cela le renvoyait constamment à ce sentiment d'insécurité, comme ci, il n'était bon qu'à cela et pas enseigner. Juste être le fantasme de donzelle en manque d'attention. Voilà pourquoi si il appréciait enseigné, il savourait les pauses par moment surtout après un cours comme celui qu'il venait de donner.

Parce que dans ce dernier, ce n'était pas tant les étudiantes qui se faisaient remarqués qu'un étudiant. Et si Dexter n'avait rien contre les hommes, le problème restait toujours le même, il n'appréciait guère l'attention trop prononcé d'un de ses étudiants à son égard. Ce dernier en plus, ne s'en cachait pas vraiment ce qui rendait les choses encore plus difficiles à ignorer. Mais il était tranquille pour le moment, il avait un moment de battement avant son prochain cours, et il pourrait aller savourer un café qui lui ferait oublier ce moment pénible. Mais manque de chance pour lui, la machine à café se situant non loin de l'amphithéâtre où il venait de passer les deux dernières heures semblait hors service et il était obligé de descendre à un étage inférieur à la recherche de la prochaine machine qui croiserait son chemin. Il laissa un grognement de frustration lui échappait. Il y avait des jours où il avait bien l'impression d'être né le lendemain de la chance. Ou tout simplement attiré le mauvais œil sur lui.

Sa théorie sembla se confirmer quand il aperçu le jeune ... Peu importe, il n'avait pas vraiment retenu son nom, après tout il voyait plus d'une centaine d'étudiants différents par jour, et même si ce dernier faisait le maximum pour se faire remarquer, Dex n'avait pas spécialement pris la peine de retenir son nom non plus. Il ne voulait en aucun cas, l'encourager un peu plus dans ses mauvaises habitudes et croire qu'il avait une importance quelconque aux yeux de Dexter. D'une part parce que Dexter n'était pas assez stupide pour risquer son droit d'exercer, et donc son permis de séjourner ici pour un vulgaire coup d'un soir et de deux, si Dexter appréciait les femmes plus jeunes, il avait toujours eu un faible pour les hommes plus vieux. Probablement la faute de Chris, mais il refusait résolument d'emprunter ce chemin de pensée, après tout pourquoi ressassait le passé cela ne servait à rien.

" Ravi de voir que vous appréciez mes cours, et je serais ravi de disserter un peu plus sur Dickens mais dans mon bureau aux heures de consultations appropriés ou en cours." Il lui adressa un petit regard significatif tout en s'éloignant légèrement, rompant le contact inapproprié qui le mettait mal à l'aise. " Je ne penses pas qu'aller boire un café en votre compagnie soit un comportement approprié pour moi "

Dexter croisa les bras contre lui, dans un signe évident de défense. Il était anglais, pour l'amour de dieu, et la plupart du temps, il avait un mal fou à suivre le mode de pensée de ses américains, si sur d'eux. Cependant en tant que professeur, il ne pouvait définitivement pas rembarrer le jeune étudiant, face à lui. Si il avait vraiment des questions sur le cours, cela s'entendait et non si c'était une technique de pression pour le faire céder à ses avances.

Déconfit, Sasha fut d’autant plus troublé que le contact de son professeur préféré fut froid et distant. Le jeune étudiant avait espéré un moment plus décontracté avec l’homme de lettres et non le professeur si stricte sur les règles et les principes. Qu’à cela ne tienne, Sasha avait bien plus d’un tour dans son sac et aurait tout mis en œuvre pour saisir l’occasion. Ca n’était pas tous les jours que lui et le professeur Lauwrence bénéficiaient d’un temps de repos en même temps. D’ailleurs leurs horaires si différents leur permettaient à peine de se croiser dans les couloirs. Pour ne pas mettre Dexter plus mal à l’aise qu’il ne l’était et sentant même avoir été trop loin dans ses agissement et par son contact impulsif et osé, Sasha recula spontanément d’un pas et lui, qui fut auparavant si sûr de lui, se radoucit comme un enfant qui s’apprêtait à se faire disputer.

- Je comprends Monsieur Lauwrence, c’est surtout que mes horaires ne me permettent malheureusement pas de venir vous voir aux heures de consultations. Je devrais apaiser ma curiosité d’une autre manière, j'imagine, tant pis... On dit que Théodore Lafosse est un de vos élèves les plus brillants, vous pensez que je pourrais lui faire part de mes idées sur Dickens ?

Le jeune antropologue fixait ses chaussures qu’il maltraitait. En effet, Sasha avait la fâcheuse tendance à abîmer ses converses en s’y appuyant sur les bords, le caoutchouc cédait rapidement lorsqu’il exécutait nerveusement ce geste trop souvent. Pour parfaire sa version du jeune étudiant timide et gêné, Sasha passait sa main dans l’arrière de ses cheveux et levait son regard tout doucement vers le professeur. Sasha appréciait vraiment le professeur Lauwrence, certes parce que l’homme possédait une véritable aura contre laquelle il était difficile de lutter mais surtout parce qu’il était le seul à savoir comment parler aux étudiants et il était capable de leur prouver que la littérature frôlait le génie et l’artistique. Pour un étudiant en Antropologie comme Sasha, ça n’était pas tant la littérature qui l’intéressait mais bien l’homme. Cet esprit incroyable qui maniait si adroitement l’écriture et qui pourtant avait fait le choix de pratiquer cet art que fort peu pour mettre son temps à disposition dans l’éducation de jeunes étudiants; Sasha trouvait cela tout bonnement fascinant. Et bien que Sasha avait fait l’erreur de penser que son physique aurait été un atout pour approcher l’érudit, il devait bien l’admettre à présent que l’esprit qui le fascinait tant, était bien plus complexe, bien plus pure même qu’il ne l’avait pensé.

- Excusez-moi, professeur…je …je ne vous importunerez plus, je vais sans doute aller voir Théodore, merci d’avoir pris le temps de me répondre.

Pour le jeune Sasha Lloyd Kingston, c’était un échec. Jamais il n’aurait l’occasion de découvrir cet homme si intéressant qui le fascinait tant, d’abord par son physique incroyablement simple et irrésistible à la fois. Mais surtout ce physique qui était enrichit d’un esprit qui rendait le tout encore plus attirant. Quand bien même Sasha n’irait pas voir Théodore, il décida de se retourner pour filer hors du couloir, le cœur lourd, ses espoirs et ses rêves du beau professeur tombés au plus profond de lui-même, dans le bas de ses chaussures. Ces mêmes chaussures avaient terriblement du mal à choisir l’autre direction et s’éloigner de Dexter, mais puisqu’il le fallait… Bien que les intentions de Sasha n’avait jamais été très chaste envers Dexter, il se trouvait extrêmement bête d’avoir même pensé une seule seconde que quelque chose entre le professeur et lui aurait été possible... Le jeune garçon esquissa un sourire et prit congé du professeur Lauwrence.