Un défi. Voilà de quoi avait sérieusement besoin Ethan. Il adorait son métier, et encore le mot était faible, c’était un véritable passionné. Mais il avait une crainte qu’il venait juste de découvrir, celle de la routine. Bien que chaque client avait une histoire différente, il en avait marre de rester toujours dans son cabinet. Bien entendu, il n’avait pas du tout envie de l’abandonner, mais il fallait absolument qu’il se diversifie s’il ne voulait pas gâcher son travail en faisant preuve d’un sérieux manque de conviction dans ce qu’il faisait.

C’est en lisant une diverse revue dans sa salle d’attente qu’il comprit ce qu’il devait faire. L’article sur lequel tomba parlait des personnalités douteuses de San Francisco, mais que l’on n’arrivait pas à inculper. Un des profils l’attira plus particulièrement ; un certain Aaron Carter. On y évoquait son penchant pour les drogues, les femmes, les armes, l’argent… Bref, tout ce qui peut salir les mains d’un homme. Pour Ethan, il ne faisait pas ça pour rien, il fallait qu’il trouve pourquoi, et ainsi l’aider à se sortir de ceci.

Il fit quelques recherches sur le personnage. En effet, son article ne l’évoquait que rapidement, et il ne disait rien sur sa personnalité. Le jeune psychologue avait besoin de quelques informations supplémentaires pour savoir comment l’aborder. Puis, avec son penchant pour les drogues et les armes, il imaginait très bien que ça ne serait pas un enfant de cœur. Et les brèves pages sur le net lui confirmèrent cela. Que des suppositions, mais on parlait d’un caractère dur, entêté, presque fermé. Bref, rien de bon pour être approché par un psychologue.

Mais cela ne découragea Ethan. Il voulait un défi, il en avait un. La simplicité n’était pas au rendez-vous, et la complexité du personnage, qui ne connaissait que par des écrits, l’intriguait de plus en plus, et lui donnait envie de creuser. De toute manière, il fallait qu’il le rencontre pour voir si Aaron était vraiment un cas d’étude si intéressant que ça. Il ne mit pas vraiment longtemps à trouver son plan d’approche. Autant se fondre dans le milieu, et, si l’on peut dire gagner la confiance de l’autre. Mais ça, c’était encore autre chose.

Parmi tous les profils qui pouvaient exister pour se fondre dans le décor d’Aaron, il choisit celui du trafiquant d’armes. Il avait déjà eu un client qui faisait ça, et il avait alors quelques notions sur ce qu’il pouvait faire. Mais pour l’instant, il avait juste besoin de faire croire ça à Aaron, car il n’avait pas prévu de lui fournir des armes… Ca sera la partie délicate du plan, où il devra ralentir les moments pour éviter de tomber dans l’illégalité.

Bref ! Ethan n’attendit pas longtemps. L’improvisation sera de mise pour atteindre son but. Il se renseigna sur l’adresse d’Aaron et s’y rendit en voiture. Heureusement pour lui, il avait une belle voiture, ce qui pouvait tout de suite lui donner du crédit. Cependant, quand il arriva dans le quartier, il remarqua tout de suite qu’il y était assez fermé. Mais, par chance, la grille était ouverte, et il pénétra dans la cour, se garant juste devant le manoir d’Aaron.

Il sortit de sa voiture et inspira un bon coup. Il ne pouvait pas faire marche arrière et se demanda si ce n’était pas lui qui devenait fou. Il approchait quand même un milieu risqué où plusieurs se sont prit des balles entres les deux yeux. Il ne connaissait pas le caractère d’Aaron, et si sa supercherie se faisait démasquer, il ne savait pas vraiment ce qu’il risquait.

Mais Ethan avait beaucoup plus de courage que ça. Il avait déjà réussi à échapper à ses parents, et même à son enfance. Ce n’était pas un simple bonhomme qui allait l’effrayer, après tout, il était comme lui. C’est ce qui lui donna du courage pour sonner à la grille du manoir. Le premier contact se ferait donc par microphone, ce n’était pas aisé pour Ethan qui mettait le visuel.

La chance lui sourit à nouveau. Le portail était mal fermé, et il put entré dans la belle cour du manoir. Il se trouva vite devant la porte, et sans vraiment s’en rendre compte, il avait déjà frappé trois coups à la porte.

(Mille excuses pour le retard, je pensais venir plus tôt, mais ma rentrée à la fac et ma nouvelle vie m’a pris beaucoup de temps)

A quoi d’autre pouvait-il s’attendre ? L’homme était froid, distant et totalement désinvolte. Seul quelques mots, son ton et son regard lui avaient permit de dresser ce bilan. De plus, Aaron, ne cachait pas du tout sa personnalité. Certains trafiquants jouaient totalement un autre rôle en société et ne devenaient que abjects au moment voulu. Aaron semblait l’être tout le temps.

C’était au tour d’Ethan de prendre la parole. Mais il était bien trop mal à l’aise, et ceci pour deux raisons, l’homme lui faisait un peu peur et il ne voulait pas échouer, mais aussi car il n’était pas dans son cabinet, et la tâche ne s’avérait pas aussi simple qu’il ne l’avait imaginé. Mais cela ne devait pas se voir, enfin du moins, cela ne devait plus se voir. C’est pourquoi Ethan pensa brièvement à ses cours de yoga, et comment il avait appris à gérer le stress et le canaliser. Il réussit ; en un instant son visage avait du se desserrer et son angoisse avait totalement disparu. C’est avec assurance qu’il prit la parole.

« Je m’appelle Ethan Silver. Et puis, je ne vais pas y aller par quatre chemins. Vous devez vous doutez qui si je suis ici, ce n’est pas pour rien. »

Il prit une courte pause pour réfléchir aux mots qu’ils allaient bien pouvoir utilisés. Il s’était imaginé la scène de multiples fois, mais la réalité était toujours bien différente. C’était une erreur grossière qu’il avait commise. Par contre, il avait fait exprès de dévoiler sa véritable identité, si Aaron faisait des recherches sur lui, il lui dira bien que son métier n’est qu’une couverture pour le reste.

« J’ai entendu parler de votre réputation. En même temps, rares sont ceux qui ne vous connaissent pas. Dans le milieu. Je suis moins même dans un groupe, si je peux appeler ça comme ceci. Nous apprécions votre style et j’aimerai savoir si vous êtes intéressé par ce que j’ai à vous proposer, car je suis sûr que nous pourrions faire de bonnes affaires. »

Deuxième pause. Son stress avait totalement disparu cette fois-ci ! Il se laissait aller dans ses paroles comme s’il était un habitué. Et surtout, il ne lâchait pas le regard d’Aaron. L’homme avait beau avoir l’air imposant, pour l’instant, il n’y avait que eux deux dans la pièce, et personne ne pouvait avoir le dessus l’un sur l’autre. Et de toute manière, Ethan, n’essayait pas de battre Aaron, ni de gagner sa confiance, mais juste de se vendre, vendre une fausse facette de lui.

« Je fais partie d’un bon réseau pour la circulation des armes. Russes, françaises, anglaises, américaines, les meilleures sur le marché. Un marché que l’on détourne simplement en fait. Bien sûr, nous faisons ça en gros… Je sais que vous savez très bien vous occupez du reste, et j’aimerai savoir s’il y a possibilité de s’arranger. »

Le sujet était planté, impossible de faire machine arrière. Ethan avait son défi.

Ethan sourit. La partie n’était pas gagnée, et il avait du mal à voir clair dans le jeu d’Aaron. Peut être était-il simplement trop franc ? Il n’en savait trop rien, mais il n’avait pas envie d’abandonner. Puis même s’il en avait envie, c’était trop tard. Mais la froideur dans le ton de son partenaire lui donnait du courage, et faisait pousser en lui un sentiment qu’il connaissait, mais pas comme ça. Il était excité, et surtout c’était l’adrénaline qui l’animait. Peut être devait-il continuer à considérer cela comme un jeu, et ainsi ne plus voir l’enjeu réellement sérieux. Tout de même, il devait avoir à faire à un homme qui avait du sang sur les mains. Mais ça, il n’en savait trop rien.

Ethan avait surement commis une erreur en employant le mot groupe. Cela ne sembla pas satisfaire du tout Aaron, qui lui posa une ribambelle de questions par rapport à ça. Tant pis, il devait corriger son erreur, et il savait exactement comme faire.

« Le terme groupe fait surement un peu… sectaire, je suppose. Je me suis mal exprimé. Je fais plutôt partie d’un réseau où l’on agit tous individuellement en son sein. On suit tous la même ligne d’action, mais nous ne sommes pas à faire des réunions tous les quatre matins, et nous ne cherchons pas à recruter particulièrement. Notre réseau est un peu partout sur le territoire, je ne peux pas vous dire plus, pas parce que je ne peux, mais parce que je ne sais pas.»

Il fallait mieux qu’il le dise maintenant. Ethan voulait paraître seul, mais avec un soutien derrière lui. Ainsi, dans sa supercherie, Aaron n’aurait besoin de communiquer qu’avec lui, et pas les fictifs membres de son réseau, puisque de toute manière, ni l’un, ni l’autre ne chercherait à se rejoindre, et il n’en n’aurait pas la nécessité.

Ethan fut surpris à un moment. Voilà qu’il lui proposait un verre de whisky. C’était tout sauf original en fait. Evidemment, il accepta volontiers et pris le verre avec un léger rictus et un signe de politesse. Inutile de faire des éloges dans ce genre de circonstances, à part être ridicule. Il regarda son verre un instant. Il aurait bien pris du coca avec, le whisky pur, il le craignait. Mais bon, être un malfrat et ne pas tenir l’alcool comme lui, était-ce vraiment compatible ? Il but en se forçant. Il reprit le cours de la conversation juste après.

« Une fois de plus, j’ai du mal m’exprimer. Nous, enfin je peux dire je aussi, ne revends pas les armes aux américains ou aux russes. On détourne simplement leurs propres armes, soit en allant en Russie, soit en restant ici. Vous comprendrez pourquoi on agit seul, mais qu’on nous ayons quand même besoin d’un appui derrière. »

Il marqua une pause, et replongea son regard dans celui d’Aaron. Mine de rien, il était pas mal du tout ce bougre !

« Nous revendons ce que nous avons pris c’est tout. Malheureusement, nous ne revendons qu’au particulier, les matériels de gros. Le reste, c’est plus dur. »

Ethan avait-il vraiment besoin de mentionner ce qu’il attendait d’Aaron. Surement pas, il avait du bien le comprendre. Si lui permettait d’ouvrir son réseau, Aaron y gagnerait beaucoup, et Ethan le montrait dans son regard. Dire que tout cela était faux.