NEVER FORGET ME

A force de regarder la lune, on en oublie les étoiles.

La nuit était déjà avancée, mais je ne dormais pas. La paperasse sur mon bureau témoignait des activités que je devais gérer, loin de ma famille. Le Mexique me manquait un peu, je devais l’admettre. Sans doute était-ce parce que rien ne m’attachait ici, concrètement. Enfin, si. Mes « enfants » et mon « ex-mari ». Mais pouvais-je espérer un jour redevenir un Mère et une Epouse pour qui que ce soit Rien n’en était moins sûr étant donné mon absence prolongée de dix-neuf longues années, du moins environ. Je ne pouvais me résoudre à me mentir à moi-même : Tout était terminé. Un peu comme ma Vie, en fin de compte. Les analyses ne présageaient rien de positif, lorsque le médecin me brandit un diagnostique. Bien sûr, il n’allait pas me condamner alors que je semblais être en pleine forme. D’autant qu’en affectant mon moral, mes chances de survie s’amenuiseraient. Hélas, je n’étais pas dupe. La Mort m’apparaissait plus souvent comme une évidence que comme une mince possibilité. Je m’y faisais, bien malgré moi. C’est à ce moment-là que je reçus un message de James, sur mon téléphone portable, ce qui me surpris beaucoup.
 
« Salut ! Excuse moi de te déranger mais tu pourrais venir me chercher au Buena Vista, je ne suis pas capable de conduire et je ne voudrais pas déranger nos enfants. Merci Linda »
 
Nos enfants ? Il aurait pu dire les siens, au final. Je pris une profonde inspiration, hésitant à lui répondre. Devais-je y aller, au risque de meurtrir mon coeur pour cet homme qui, lui, avait refait sa vie ? Je me sentis ridicule. D’un autre côté, ne pas m’y rendre serait considéré comme une marque de faiblesse. Hors, je me savais plus forte que la moyenne. Je me redressai alors et j’appelai la sécurité pour prévenir de mon départ, mais surtout que je ne voulais pas être suivie par mes gardes. Il s’agissait-là d’un problème privé que je devais résoudre. Je m’engouffrai alors dans le garage et choisis une Audi en guise de voiture de déplacement. Je ne devrai pas en avoir pour long, étant donné que je me contenterais de le déposer. Toutefois, sur le trajet, je me demandais pourquoi il s’était rendu dans ce bar où la plupart des personnes entraient pour se faire tatouer. Un tatouage pour sa nouvelle compagne, peut-être ? Je grommelai, intérieurement. Bien que, au fond, cela ne me regardait pas vraiment. Une fois arrivée, je garai la voiture dans le parking et je m’engageai à l’intérieur de l’endroit. Mine de rien, c’était plutôt agréable. Mais rien avoir avec « The Black Grange » que je dirigeais désormais. Il ne me fallut guère longtemps pour repérer James. Et le raté du battement de mon coeur ne fit que le confirmer. Je m’approchai alors de lui, déposant une main sur son épaule, avant de m’asseoir à ses côtés. « Hey... » Lui fis-je doucement, avec un,  sourire délicat. Hum, il sentait l’alcool à plein nez. D’ailleurs, il avait eu de la chance. Normalement, à cette heure-ci, je suis à moitié dans le coma après avoir vidé ma bouteille de whisky quotidienne. Cependant, il ne savait pas que j’étais dépendante. Et puis, cela changeait quoi ? De toute façon, j’allais mourir. Je remarquai alors à son air triste que quelque chose n’allait pas. De plus, cela ne lui ressemblait pas de boire au point de ne pas pouvoir conduire. « Je ne savais pas que tu appréciais à ce point les alcools forts... » Lui fis-je remarqué en voyant la bouteille à moitié vide et le barman un peu surpris de devoir, probablement, le servir plusieurs fois d’affilé. Essayant de ne pas paraître étonnée ou malheureuse même de le voir dans un tel état, je préférai amorcer les choses. « Tu voulais te tatouer pour venir dans un tel endroit ? » Finis-je par demander, plus pour essayer de comprendre son état que pour savoir si c’était effectivement le cas.
 

FICHE ET CODES PAR EPISKEY.