« Tu devais me rejoindre ici avec mon putain de chèque Dexter ! » Vêtue d’un jean et d’un débardeur blanc assorti d’un fin gilet, je me trouvais en plein cœur du centre commercial. Il était 18h passée, et les gens commençaient déjà à évacuer les magasins pour rentrer chez eux. Il y avait aussi les petits retardataires qui arrivaient en urgence faire leurs dernières emplettes. Et puis il y avait moi, au téléphone, en train de me prendre la tête avec mon photographe, slash, dealeur, slash violeur à temps partiel. Même si cette situation me déplaisait au plus haut point, ma vie entière dépendait de ce fumier. Sans lui : pas d’argent. Sans argent, j’étais quasiment à la rue. On était en début de mois et je n’avais plus un sou en poche. Dexter ne m’avait toujours pas payé le moi précédent et il semblait y prendre plaisir. Cela lui donnait encore plus de pouvoirs sur moi. « Si tu veux ton blé, et ta dose en passant, pointe toi chez moi dans une heure avec un nouvel ensemble de sous-vêtements et je verrais ce que je peux faire pour toi trésor. » Je secouais la tête, faisant un doigt d’honneur dans le vent. Il ne pouvait bien sur pas le voir mais ça soulageait ! « Et je fais comment sans argent pour m’offrir des sous vêtements ? » Je l’entendis rire à l’autre bout du fil ce qui eut le don de m’énerver d’avantage. Je n’étais pas toujours autant à fleur de peau, mais, étant en état de manque flagrant, je devenais très irritable.« Improvise ! » Je fulminais mais n’eus pas l’occasion de répondre puisqu’il avait déjà raccroché. Je comprenais maintenant mieux pourquoi il avait insisté pour qu’on se donne rendez-vous au centre commercial. Il avait tout prévu ! C’était encore un de ses jeux pervers pour voir jusqu’où j’étais prête à aller pour ma dose. Je rangeais mon portable dans mon sac et me dirigeais d’un pas décidé vers le magasin de lingerie. Une fois à l’intérieur, je pris le premier ensemble que je trouvais et me dirigeais vers les cabines d’essayage. Je passais les dessous par-dessus ceux que je portais déjà et me rhabillais. C’était une petite boutique qui ne payait pas de mines. Il n’y avait probablement pas d’antivols, n’est-ce pas ? De toute façon, je n’étais pas vraiment en état de bien y réfléchir. Au pire je mettrais à profit les séances de sprint et de course du lycée. L’air de rien, je parvins à sortir des cabines sans difficultés, mais, à peine eus-je mis un pied dehors que les portiques se mirent à sonner. J’entrepris de courir mais c’était sans compter le vigile qui faisait le double de moi et qui me retint par le bras. Génial. C’était juste parfait. « Mademoiselle… Veuillez me suivre s‘il vous plait ! »

Alors que je tentais de me débattre, il força un peu plus sur mon bras et je fus contrainte de le suivre dans son local. Prenant son rôle de vigile très à cœur, il n’hésita même pas à m’attacher les mains dans le dos avec des menottes. Sérieusement ? « Il faut vraiment pas être maline pour espérer réussir à voler aussi facilement sans faire le moindre effort ! » Je levais les yeux au ciel. Je ne cherchais même pas à engager le dialogue. En effet, à cet instant précis, une seule chose obnubilait mes pensées : la drogue. Je devais réussir à me sortir de ce pétrin, et vite ! Plus vite je serais sortie et plus vite je réussirais à rejoindre mon fournisseur. Remarquant surement les perles de sueurs qui perlaient sur mon front ou mon agitation continue, le vigile eut un sourire satisfait. « J’aurais du m’en douter… Une junkie ! J’avoue que je vous trouvais un peu trop mignonne pour ça, mais, avec la racaille de votre genre il faut se méfier des apparences… Et bien ! On va avertir plus compétent que moi. » J’ouvris de grands yeux ronds en l’entendant appeler les flics. Ah non… Surtout pas ça. Je ne pouvais pas me permettre d’avoir un casier. Surement pas ! Je m’agitais d’avantage pour essayer de retirer mes menottes, mais, de toute évidence, il les avait bien serrer. Alors que je jetais un coup d’œil sur le reste du centre commercial - la seule vue dont disposait le bureau du vigile - je pus constater que les lumières étaient éteinte et que le centre commercial avait surement fermé ses portes. Un sourire se dessina sur mes lèvres et je me levais. C’était surement la plus belle erreur de cet agent de sécurité. Plutôt que de m’attacher les mains ensemble, il aurait du les attacher à la chaise. « Hey ?! » Il se tourna vers moi, visiblement surpris de me voir debout. Je profitais de cet élément de surprise pour lui donner un coup de pied dans le ventre. Le coup le fit se courber en deux et j’en profitais pour le frapper à nouveau, à la tête cette fois. Le coup l’assomma sur le coup. Finalement, les cours de self-défense n’avaient pas été une perte de temps. Dommage que j’étais totalement incapable de les pratiquer contre Dexter. Ils auraient pu être utile. Je me couchais littéralement sur le vigile, afin d’attraper les clefs qu’il avait noué à sa ceinture. Avec bien des difficultés, je parvins à les attraper et je me débarrassais alors des menottes. Je pris quelques secondes pour me masser mes poignets douloureux puis je partis en quatrième vitesse. Je doutais fort que ce gros nounours soit le seul gorille de ce centre commercial. Mon premier réflexe fut de me diriger vers les portes principales, mais elles étaient closes. Je soupirais et tentais de les ouvrir avec plus d’énergie. Rien à faire ! Et, ce n’était pas le moment de trainer… J’entendais des pas. Je partis donc en courant vers le milieu du centre commercial et, dans ma course, j’heurtais une personne. Je crus qu’il s’agissait d’un autre garde mais il s’agissait en fait d’une jeune femme. Probablement une cliente. Que foutait-elle là par une heure pareille ? « Qu’est-ce que vous faites ici ? » Puis tentant de me faire passer pour une pauvre victime de mon inattention, je précisais : « Vous aussi vous vous retrouvez enfermé après la fermeture ? Moi qui croyait qu’il y avait que dans les films qu’on voyait ça ! » J’affichais le plus beau de mes sourires afin de mettre la jeune femme en confiance. Après tout, je n’étais absolument pas dangereuse. J’étais juste une junkie voleuse à ses heures perdues, mais, également, une étudiante en science politique. Qui ne me ferait pas confiance ?